Les parlementaires viennent d’adopter la loi Le Meur, “visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale” (dite “loi anti-Airbnb”). La croissance des locations meublées et en particulier touristiques, s’est en effet accélérée au détriment du parc locatif nu, dont le nombre de logement en location a baissé.
Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts-de-France, fait le point de tous les changements récents, en cours, et à venir pour les meublés de tourisme. Changements qui rapprochent les règles et obligations entre les meublés de tourisme et les locations longue durée, tant sur le plan fiscal que sur la mise en conformité avec la loi Climat et Résilience de 2021.
—La nouvelle loi Le Meur
—Location saisonnière interdite pour les logements énergivores
La loi soumet les meublés de tourisme et les locations de longue durée aux mêmes critères de performance énergétique à partir du 1er janvier 2034. Voir notre article Le plan de sobriété énergétique. Le but est de limiter le phénomène d’éviction du logement locatif permanent au profit de la location touristique. Ainsi, en location à long terme :
- les biens classés G seront interdits à la location dès 2025,
- et les biens classés F en 2028.
Quant aux meublés de tourisme :
- ils ont 10 ans pour atteindre au moins D (en 2034)
- ils doivent atteindre au moins E en 2025 dans les communes qui appliquent la réglementation sur le changement d’usage.
À noter que les résidences principales louées occasionnellement et l’Outre-mer ne sont pas concernés.
—Sanctions et contrôles des bailleurs ne respectant pas l’obligation du DPE
La loi crée un nouvel article (L. 324-2-2) au code du tourisme. Elle permet au maire de demander à tout moment au propriétaire d’un meublé de tourisme la transmission dans un délai de deux mois le DPE en cours de validité. Faute de quoi, le propriétaire est passible d’une astreinte administrative de 100 € par jour jusqu’à la délivrance du DPE. Si les critères DPE ne sont pas respectés, l’amende administrative peut atteindre 5 000 € par local concerné.
—Obligation d’enregistrement en mairie
L’obligation de déclaration en mairie ne fait pas toujours l’objet d’un enregistrement. Or celui-ci permet de demander des pièces justificatives. La loi oblige désormais l’obtention d’un numéro d’enregistrement pour tous les meublés de tourisme, et sera applicable au plus tard le 20 mai 2026.
La loi met aussi en place un télé-service national. Le loueur y met à jour sa déclaration (changement des informations ou des pièces justificatives fournies). Il y renouvelle sa déclaration à l’expiration d’un délai fixé par décret. (Nouvel article L. 324-1-1 du code du tourisme). Ce qui rendra plus difficile la fraude, auparavant facilitée par une simple « déclaration ».
Les maires pourront ainsi contrôler le respect de la réglementation par les loueurs (sécurité incendie, performance énergétique, etc.). Ils pourront suspendre le cas échéant la validité du numéro de déclaration, en cas d’arrêté de péril par exemple.
Le non-respect de cette obligation d’enregistrement est passible d’une sanction pouvant atteindre 10 000 €, portés à 20 000 € en cas de fausses déclarations. (ou d’usage d’un faux numéro de déclaration).
—Autorisation préalable au changement d’usage
Le changement d’usage consiste à transformer un local à usage d’habitation en un local professionnel ou commercial.
L’autorisation préalable concerne les logements des communes de plus de 200 000 habitants, ou situés dans les Hauts-de-Seine (92), la Seine-Saint-Denis (93) ou le Val-de-Marne (94). Elle peut aussi être rendue obligatoire dans d’autres communes par décision du conseil municipal ou de la communauté de communes.
Le texte de loi élargit le périmètre des communes pouvant appliquer, sans autorisation du préfet, la réglementation de changement d’usage. Les communes pourront également élargir la réglementation à tous les locaux qui ne sont pas “à usage d’habitation”. Elles réguleront ainsi les pratiques de transformation de bureaux en meublés touristiques. Les investisseurs étaient déjà soumis (depuis 2021) à une autorisation pour transformer des commerces en logements touristiques.
—Quotas de meublés de tourisme dans le PLU
Dans les communes où s’applique la taxe annuelle sur les logements vacants, ou qui comptent plus de 20% de résidences secondaires, la nouvelle loi permet aussi :
- de fixer des quotas de meublés de tourisme,
- ou de réserver dans leur plan local d’urbanisme (PLU) certaines zones à la construction de logements destinés uniquement à de la résidence principale.
—Plafonnement à 90 jours de la location d’une résidence principale
Avec la nouvelle loi, les communes peuvent aussi abaisser, « sur délibération motivée » à 90 jours le nombre maximal de jours de location d’une résidence principale. (contre 120 jours par an aujourd’hui). L’amende pour dépassement pourra atteindre 15 000 €. (contre 10 000 € jusqu’à présent).
—Nouvelles périodes de référence pour simplifier la preuve d’usage d’habitation
Jusqu’à présent, les collectivités devaient prouver que le bien était utilisé comme logement précisément au 1er janvier 1970. Pour rappel, toute convention (contrat de location, bail commercial..) conclue sur la base d’un usage irrégulier d’un local est frappée de nullité.
Désormais, deux périodes de référence viennent faciliter la charge de la preuve pour les collectivités en cas de contentieux :
- toute preuve d’usage d’habitation entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1976 est désormais recevable,
- tout moment au cours des 30 dernières années précédant soit la demande d’autorisation, soit la contestation d’usage.
—La régulation des meublés de tourisme dans les copropriétés
Les copropriétés qui comportent dans leur règlement une clause dite « d’habitation bourgeoise” (*) pourront modifier ce règlement à la majorité simple, contre l’unanimité aujourd’hui, pour autoriser ou interdire la location d’appartements en meublé de tourisme.
L’interdiction de la location de meublés de tourisme ne sera cependant possible que dans les copropriétés où le règlement proscrit déjà toute activité commerciale dans des lots.
(*) La clause “bourgeoise” simple autorise des activités libérales (cabinets de médecins…) dans l’immeuble, à condition qu’elles ne génèrent pas de nuisances, sonores en particulier. Elle interdit les activités commerciales en dehors des lots dédiés (par exemple commerces en rez de chaussée). La clause dite « exclusive » interdit toutes les activités (commerciales, artisanales et libérales) dans l’immeuble.
Tout nouveau règlement de copropriété devra obligatoirement se prononcer sur la possibilité ou non de louer des logements en meublé de tourisme.
Enfin, les propriétaires et les locataires autorisés devront informer le syndic, en cas de déclaration préalable de transformation de leur logement en meublé de tourisme. Le syndic inscrira un point d’information sur les meublés de tourisme à l’ordre du jour de la prochaine AG des copropriétaires. Cette disposition vise à limiter les conflits entre copropriétaires. (disparition de l’anonymat du loueur, qui sera dès lors incité à limiter les nuisances de sa location).
—Transmission par les plateformes de certaines données
L’article L. 324-2-1 du code du tourisme prévoit déjà l’obligation pour les plateformes de transmettre certaines données sur les meublés de tourisme loués par leur intermédiaire aux communes qui en font la demande. La loi sanctionne dorénavant le défaut de transmission de ces données d’une amende de 50 000€ maximum par meublé.
—Les autres mesures “anti Airbnb” :
—Suppression de la niche fiscale sur les locations meublées (PLF 2025)
Afin de rapprocher les régimes de la location meublée et de la location nue, le projet de loi de finances 2025 réintègre les amortissements dans l’assiette de la plus-value imposable au moment de la cession. La mesure s’appliquerait aux cessions réalisées après le 1er janvier 2025 par les contribuables qui relèvent du régime de la location meublée non professionnelle (LMNP). Un dispositif transitoire serait mis en place. Voir aussi notre article La fiscalité de la location saisonnière.
Par ailleurs, la mesure ne s’appliquerait pas aux locations meublées sous un bail mobilité, d’une durée d’un à neuf mois pour les étudiants, salariés en mission temporaire ou en formation professionnelle. Y échapperaient aussi les investissements dans les résidences gérées. (par exemple, pour les étudiants ou les seniors).
D’autre part, un amendement au PLF prévoit de porter de 30% à 50% le taux d’abattement fiscal du régime micro-foncier pour les locations nues (dans la limite de 15 000 €). L’objectif est de favoriser le logement pérenne.
—Meublés de tourisme dans les revenus
La loi de finances 2024 a raboté l’avantage fiscal des loueurs en location meublée saisonnière. Et modifie le régime « micro‑BIC ». L’abattement fiscal passe :
- à 50% pour les meublés classés et chambres d’hôtes dans la limite de 77 700 euros de revenus locatifs annuels. (contre aujourd’hui 71% dans la limite de 188 700 euros) ;
- à 30% pour les meublés non classés dans la limite de 15 000 euros de revenus locatifs annuels. (contre aujourd’hui 50% dans la limite de 77 700 euros).
Ces nouveaux taux d’abattement s’appliqueront aux revenus locatifs perçus à partir de 2025. Les revenus 2024 avaient fait l’objet d’une exception.
De plus, des discussions seraient en cours autour du projet de loi de finance (PLF 2025), en cours d’examen, pour faire passer un alignement de l’abattement de la location meublée et non meublée (micro-foncier) à 40 %.
—Boite à clés
Enfin, de nombreuses communes (Lille, Paris, …) se battent à coup d’arrêtés municipaux contre la prolifération des boites à clés sur le domaine public. Et ce, bien qu’il soit déjà formellement interdit par la loi d’apposer un quelconque dispositif dans la rue ou sur le mobilier urbain (biens d’équipements publics, bancs publics, réverbères, armoires électriques, poteaux etc.).
—Transmission mensuelle des données
Une réglementation européenne complète le dispositif. depuis Février. La transmission des données aux communes doit être mensuelle et doit intégrer l’URL de l’annonce en plus de l’adresse du bien. Cela permet un meilleur contrôle de la part des communes, et leur évite des recherches fastidieuses.
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