Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, un impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, remplace l’ISF, supprimé au 1er Janvier 2018. Cela modifie en profondeur la fiscalité du capital, dans le but d’encourager les investissements productifs et de financer l’économie réelle.
Quels biens retenir ? Quelles valeurs prendre en compte ? Quelles évolutions par rapport à l’ISF ? Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts de France, détaille dans cet article tous les éléments à prendre en compte pour le calcul de ce nouvel impôt sur la fortune immobilière.
Qui est soumis à l’IFI ?
Tout foyer fiscal qui possède un patrimoine immobilier (c’est à dire après déduction des dettes liées à ce patrimoine) de plus de 1,3 millions d’euros (en valeur nette) au 1er Janvier doit le déclarer à l’Impôt sur la Fortune Immobilière. Le montant de ce premier plancher est le même que dans l’ISF.
Le foyer fiscal comprend l’ensemble des personnes dont les ressources font l’objet d’une seule et même déclaration de revenus. Il peut s’agir :
- soit d’une personne vivant seule (célibataire, veuve, divorcée, séparée),
- soit de personnes vivant maritalement (mariées, pacsées ou en concubinage),
et leurs enfants mineurs dont ils ont l’administration légale.
Le lieu du domicile fiscal détermine les biens imposés
(Retrouvez notre article Comment déterminer son domicile fiscal ?)
Si celui-ci est en France, l’imposition concerne l’ensemble des biens (et/ou droits immobiliers, parts ou actions de sociétés immobilières) détenus en France et à l’étranger.
Si celui-ci est à l’étranger, l’imposition concerne l’ensemble des biens et droits immobiliers, parts ou actions de sociétés immobilières détenant de l’immobilier en France, et, à hauteur des biens et droits possédés en France, l’ensemble des parts ou actions de sociétés immobilières détenant de l’immobilier en France et à l’étranger. Ainsi la définition de ces biens (immobiliers) est elle plus large qu’avec l’ISF, qui ne prenait en compte que les biens situés en France
Quels biens prendre en compte ?
Il faut déclarer à l’IFI tout son patrimoine immobilier. Cela comprend les biens, mais aussi les droits immobiliers, détenus au 1er janvier, directement et indirectement au travers de structures sociétaires :
- les immeubles bâtis, qu’ils soient à usage personnel ou mis en location : maisons, appartements, et leurs dépendances, garage, parking, cave, etc.,
- les immeubles en cours de construction au 1er janvier,
- et les immeubles non bâtis (terrains à bâtir, terres agricoles),
- les bâtiments classés monument historique,
- les parts de sociétés immobilières (copropriétés, immeubles ou fractions d’immeubles, ..).
La résidence principale, comme précédemment dans l’ISF, fait l’objet d’un abattement (réduction forfaitaire) de 30 % sur sa valeur au 1er janvier.
Certains biens sont partiellement ou totalement exonérés, sous certaines conditions. Il s’agit :
- des immeubles utilisés pour son activité professionnelle,
- de bois et forêts sous engagement d’exploitation, ou à usage professionnel,
- des biens ruraux loués à long terme, ou à usage professionnel (terrains agricoles, bâtiments et matériels d’exploitation),
- de logements loués meublés sous le régime fiscal du loueur en meublé professionnel (recettes supérieures à 23.000 euros, et supérieures aux autres revenus professionnels).
L’usufruit et le droit d’usage sont aussi à déclarer
« Les actifs taxables à l’Impôt sur la Fortune Immobilière grevés d’un usufruit, d’un droit d’habitation ou d’un droit d’usage accordé à titre personnel sont compris dans le patrimoine de l’usufruitier ou du titulaire du droit pour leur valeur en pleine propriété ». (Voir notre article Le démembrement de propriété)
Le nu-propriétaire n’est pas redevable de l’IFI sur la valeur du bien détenu en nue-propriété; c’est l’usufruitier qui doit intégrer le bien pour sa valeur en pleine propriété, sauf lorsque la loi prévoit une imposition répartie entre l’usufruitier et le(s) nu(s)-propriétaire(s), selon un barème établi en fonction de l’âge de l’usufruitier (art. 669 du CGI) :
Tableau de la valeur de l’usufruit et de la nue propriété
Age de l’usufruitier | Valeur de l’usufruit | Valeur de la nue-propriété |
Moins de 21 ans révolus | 90 % | 10 % |
Moins de 31 ans révolus | 80 % | 20 % |
Moins de 41 ans révolus | 70 % | 30 % |
Moins de 51 ans révolus | 60 % | 40 % |
Moins de 61 ans révolus | 50 % | 50 % |
Moins de 71 ans révolus | 40 % | 60 % |
Moins de 81 ans révolus | 30 % | 70 % |
Moins de 91 ans révolus | 20 % | 80 % |
Plus de 91 ans révolus | 10 % | 90 % |
Retrouvez aussi l’article 669 du CGI sur le site de Legifrance.
Ce principe est cependant sujet à plusieurs exceptions, selon la nature de l’usufruit. Attention donc à l’évaluation des biens détenus en démembrement :
Dans le cas d’un usufruit “légal”, il y a répartition de l’IFI entre l’usufruitier et le nu-propriétaire en application de l’article 669 du CGI.
Dans le cas d’un usufruit “conventionnel”, d’une donation entre époux et d’une donation dernier vivant, il y a imposition de l’usufruitier sur la pleine propriété. Ainsi, en l’absence de donation au dernier vivant, le conjoint survivant qui choisit de recevoir la totalité de l’héritage en usufruit sera imposé sur la valeur du bien en usufruit et les enfants du défunt seront imposés sur la valeur de la nue-propriété.
Dans le cas d’une donation de la nue-propriété d’un bien immobilier dont le donateur se réserve l’usufruit, il y a imposition de l’usufruitier sur la pleine propriété
Dans le cas d’une vente de la nue-propriété d’un bien immobilier (avec réserve d’usufruit pour le vendeur) au profit d’une personne qui n’est pas un héritier présomptif, il y répartition de l’IFI entre l’usufruitier et le nu-propriétaire en application de l’article 669 du CGI.
Cas du viager
Le viager procède du même principe d’usufruit et de nue-propriété. Le vendeur d’un bien (appelé crédirentier) est l’usufruitier du bien qu’il a vendu, et l’acheteur d’un bien (appelé débirentier) en est le nu-propriétaire.
En cas de viager “occupé”
Crédirentier et débirentier déclarent chacun, selon le barème de l’art. 669 du CGI, la part qui leur revient de la valeur vénale réelle du bien immobilier concerné, c’est à dire du prix qu’ils auraient normalement négocié (au 1er Janvier de chaque année). Ainsi le crédirentier ne déclare-t-il que la valeur de l’usufruit, c’est à dire la valeur d’occupation du bien. Alors que c’était le cas avec l’ISF, il n’a plus à déclarer le capital que représente sa rente viagère, puisqu’il ne s’agit pas d’un actif immobilier mais d’une créance.
De son côté, le débirentier déclare la valeur de la nue-propriété. (Peut-il déduire la valeur de capitalisation de la rente avec l’IFI, comme il le faisait avec l’ISF ?)
En cas de viager “libre”
Le débirentier (l’acheteur) déclare le bien acquis pour sa pleine propriété et peut déduire la valeur du capital représentatif de la rente, comme avec l’ISF.
Placements et liquidités liés à l’immobilier (parts ou actions de sociétés immobilières)
Les investissements dans la “pierre papier”, SCPI, OCPI, foncières cotées, etc., qu’elles soient détenues en direct ou dans un contrat d’assurance-vie sont imposables à l’IFI, à concurrence de la part investie dans l’immobilier :
- les parts ou actions de sociétés ou d’organismes détenant de l’immobilier en France sont à déclarer à hauteur de la valeur des immeubles détenus par la société ou l’organisme, sauf en cas de possession de moins de 10 % du capital de la société propriétaire, ou, sous certaines conditions, lorsque ces biens immobiliers sont affectés à l’activité de la société qui en est propriétaire ou d’une société liée,
- les biens et droits immobiliers transférés en fiducie ou placés dans un trust pour leur valeur vénale au 1er janvier,
- la fraction de la valeur de rachat au 1er janvier représentative des actifs immobiliers imposables compris dans les UC (unités de compte) des contrats d’assurance-vie.
Déduction des dettes liées à l’immobilier
Seules les dettes contractées pour financer des biens imposables peuvent être déduites de la valeur du patrimoine avant imposition, à condition de pouvoir les justifier. Elles sont relatives :
- aux emprunts immobiliers, c’est à dire liés à l’acquisition de biens ou droits immobiliers imposables,
- aux emprunts contractés pour l’acquisition de parts ou actions de sociétés immobilières, au prorata de la valeur des biens et droits immobiliers imposables liés.
- au paiement des travaux d’amélioration, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement,
- aux paiements de travaux d’entretien effectivement supportés par le propriétaire (y compris lorsque le locataire aurait dû les payer mais ne l’a pas fait au 31 décembre de son année de départ).
- au paiement de la taxe foncière ou des droits de succession dus, liés aux propriétés concernées. (mais pas la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, ni la taxe sur les locaux vacants, ou encore la taxe sur les bureaux en Ile-de-France),
- À “l’IFI théorique”, dû sur le montant du patrimoine net au 1er janvier.
On prendra en compte ces dettes à hauteur du capital restant dû au 1er janvier de l’année d’imposition.
En ce qui concerne les biens détenus au travers d’une société, voir notre article : Dette immobilière et IFI.
Au contraire de l’ISF, les impôts ne sont plus déductibles, hormis la taxe foncière. Mais ils restent pris en compte pour le calcul du plafonnement. Ainsi les impositions incombant à l’occupant, comme la taxe d’habitation, ou à la part de l’IR (impôt sur le revenu) correspondant aux biens immobiliers (revenus fonciers par exemple), ne sont plus déductibles.
Emprunts in fine
Attention, contrairement aux règles qui prévalaient avec l’ISF, les emprunts in fine ne sont plus déductibles chaque année sur la totalité du capital restant dû. La part déductible sera obtenue en pratiquant un amortissement linéaire théorique sur la durée de l’emprunt.
Dispositif “anti-abus”
Lorsque la valeur des biens immobiliers dépasse 5 millions d’euros, les dettes déductibles au delà de 60% de la valeur de l’actif déclaré ne sont prises en compte qu’à hauteur de la moitié de leur montant.
Prêts familiaux
Les prêts réalisés en famille ne sont pas déductibles. Seules les dettes contractées auprès d’un proche ne faisant pas partie du foyer fiscal peuvent être prises en compte. Et ce, à la condition que le redevable justifie du caractère “normal” du prêt.
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