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Le viager

La vente en viager procure au vendeur des revenus en complément de sa retraite. L’acheteur, de son côté, réalise un contrat aléatoire, qui peut se révéler une « bonne affaire ». Ce type de vente est soumis à un régime juridique et fiscal spécifique.

Comment fonctionne le viager ? Quels sont les caractéristiques principales de ce contrat ? Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts-de-France, fait le point sur ce type particulier de vente à terme.

Définition du viager

Popularisé en 1972 grâce au film (*) du même nom, le viager consiste à vendre son logement, libre ou occupé, en échange d’une rente jusqu’à son décès imprévisible.

(*) “Le viager”, un film de Pierre Tchernia, scénario de René Goscinny, avec Michel Serrault, Michel Galabru, Rosy Varte et une distribution prestigieuse.

Caractéristiques du viager

La vente d’un bien en viager consiste à en transférer la propriété en échange du versement d’une rente jusqu’à son décès. En droit, on appelle le vendeur “crédirentier”, ou créditeur de la rente, et l’acheteur le débirentier, puisqu’il est débiteur de la rente.

          L’aléa de la longévité

Le décès doit être imprévisible pour que la vente soit valide. Aussi faut-il que l’aléa de la longévité du vendeur existe réellement. Dans le cas d’un vendeur quasi mourant, la vente serait considérée comme nulle. (Art. 1975 du Code Civil). De même si un vendeur malade le jour de la signature décède dans les 20 jours de la vente.

          Une ou plusieurs têtes

Il peut s’agir d’un “viager sur une seule tête”, ou, lorsque c’est un couple qui vend le bien, un “viager sur deux têtes”. Dans ce dernier cas, le viager n’est conclu qu’au décès du dernier des conjoints. Une clause de réversibilité permet le versement intégral de la rente au survivant des époux.

          Libre ou occupé

La vente peut se faire en viager libre ou en viager occupé. Dans le premier cas, le bien est vendu libre de toute occupation et de toute réserve de jouissance. (Voir notre article Le démembrement de propriété)

L’acquéreur en dispose librement dès la signature de la vente. Il peut l’occuper, ou le louer et en percevoir des loyers.

En cas de viager occupé, le vendeur conserve toute sa vie :

  • un droit d’usage du bien vendu. Le vendeur qui dispose d’un droit d’habitation peut habiter dans le logement, mais ne pourra pas donner le bien en location. Le droit d’habitation peut être réservé jusqu’au décès du conjoint du vendeur.
  • l’usufruit, qui lui permet, s’il le souhaite, de louer son bien et d’en percevoir des loyers. Dans ce cas, c’est potentiellement désavantageux pour l’acquéreur, qui n’est pas certain de pouvoir occuper le logement dès le décès du vendeur. (puisqu’un locataire peut se trouver dans les lieux).

          Les charges

La répartition des charges du bien vendu entre le vendeur et l’acheteur diffère selon le type de viager et/ou les clauses du contrat. De manière habituelle, si le viager est occupé, les réparations et entretiens courants sont à la charge du vendeur, de même que la taxe sur les ordures ménagères, l’acquéreur supportant, lui, les grosses réparations et la taxe foncière (sauf, pour cette dernière, en cas d’usufruit du vendeur).

En cas de viager “libre”, il est évident que toutes les charges tombent sur les épaules de l’acquéreur.

Le calcul de la rente et du “bouquet”

          L’aléa

Le calcul de la rente se base sur l’espérance moyenne de vie. Ainsi, lorsque le vendeur décède à l’âge de l’espérance moyenne de vie, l’acheteur aura intégralement payé le prix normal du logement. Au contraire, si le vendeur vit plus longtemps, l’acheteur paiera plus, et si le vendeur décède avant le terme de son espérance de vie, l’acheteur paiera moins que la valeur réelle du bien.

          Les critères

Le calcul utilise donc des tables qui tiennent compte de l’âge et de l’espérance de vie du vendeur, de la valeur du bien, des loyers que le vendeur pourrait toucher s’il mettait son bien en location, mais aussi  du critère du nombre de têtes, et de l’occupation éventuelle du bien. (Les tables de mortalité : plus le vendeur est jeune, plus le montant de la rente est faible).

Dans le cas d’un viager libre, on convertit le prix total du bien en rente, dont le débirentier aura l’usage dès la signature de l’acte de vente.

En cas de viager occupé, on déduit du prix de vente le prix de l’occupation. La rente n’est alors assise que sur la différence.

          Le bouquet

Non obligatoire, et librement fixé par les parties, le bouquet est un montant que le crédirentier (vendeur) peut demander dès la signature du contrat. Il est déduit du prix de vente, pour recalculer une rente qui sera alors plus faible. Ce capital, payé comptant, représente en général entre 20 et 30 % de la valeur du bien.

          Modalités de paiement

Le viager est une vente immobilière, qui nécessite la rédaction d’un acte authentique par un notaire. Les modalités de paiement sont particulières, puisque le versement du prix n’est pas immédiat, et se traduit par une rente versée à vie au vendeur, et éventuellement un “bouquet”. Le paiement est généralement mensuel, mais les contractants peuvent convenir d’une autre périodicité (trimestrielle, annuelle, etc.).

La vente en viager est sécurisée par une clause résolutoire, et, parfois, une clause pénale qui permet au vendeur de se réserver le droit de conserver le bouquet en cas de résiliation du contrat de vente.

Il s’agit donc d’une forme de vente à terme, où la propriété du bien (mais non sa jouissance) est transmise dès la signature du contrat.

          Indexation

La rente est généralement indexée, par exemple sur l’indice des prix de la construction, où celui des prix à la consommation.

Fiscalité

Droits de mutation

De façon tout à fait classique en France, ils sont dus par l’acquéreur,

Impôts locaux

Ils sont dus par l’usufruitier du viager. Ainsi, sauf accord entre les parties dans l’acte de vente :

  • en cas d’un viager «occupé avec usufruit», c’est le vendeur qui en est redevable.
  • lorsque le vendeur n’a qu’un droit d’usage et d’habitation sur le logement vendu, c’est l’acheteur paye la taxe foncière.
  • en cas de viager «libre», c’est aussi l’acheteur qui supporte la taxe foncière.

IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière)

Les droits de chacun sont à déclarer :

  • Dans le cadre d’une vente en viager occupé, le vendeur conserve le droit d’usage et d’habitation (DUH) ou l’ Il doit déclarer la valeur de chacun de ces droits, à partir du même barème fiscal. Le seul droit d’usage, pour être plus restreint, bénéficie d’un abattement de 40 %. Si l’acheteur est un héritier présomptif du crédirentier, au sens de l’article 751 du CGI, ce dernier (le vendeur) est imposé sur la valeur en pleine propriété du bien.
  • De son côté, l’acheteur d’un viager «occupé» déclare à l’IFI la valeur de la nue-propriété du bien. En cas de viager «libre», il déclare la valeur de l’immeuble acheté et inscrit au passif la valeur du capital représentatif de la rente.

IRPP

La rente viagère est imposable pour le crédirentier, pour une fraction de son montant, selon son âge au jour du premier versement :

  • 70 % s’il a moins de 50 ans,
  • 50 % de 50 à 59 ans inclus,
  • 40 % de 60 à 69 ans inclus,
  • 30 % s’il a plus de 69 ans.

La déduction forfaitaire de 10 % ne s’applique pas à la fraction imposable des rentes viagères. Et les prélèvements sociaux (17,2 %) sont dus au titre des revenus du patrimoine.

La rente n’est pas déductible des revenus du débirentier.

Plus value de cession du bien

Pour le vendeur (crédirentier) :

La valeur d’un bien vendu au travers d’une rente viagère est la valeur en capital de la rente hors intérêts augmentée, le cas échéant, du bouquet. S’il s’agit de la résidence principale du vendeur, le bouquet n’est pas imposable. S’il s’agit d’une résidence secondaire ou d’un investissement locatif, le bouquet est soumis à la taxation des plus-values. La plus-value est taxée l’année de la cession.

Pour l’acquéreur :

Le calcul de la plus-value à la revente n’est pas la même si l’opération intervient avant ou après le décès du crédirentier.

Les avantages et inconvénients du viager

pour le vendeur

Le vendeur en viager (le crédirentier) bénéficie une véritable retraite complémentaire. S’il n’a pas d’enfant, il résout également son problème successoral. Le vendeur peut également choisir le viager solidaire.

Les inconvénients

Par contre, il peut exister un risque de non-paiement de la rente, de la part d’un acquéreur insolvable. Une clause résolutoire, en cas de non-paiement de la rente viagère, permet de faire annuler la vente. Mais il faut faire constater l’annulation par le tribunal de grande instance, ce qui prend du temps et entraîne des frais d’avocat.

Attention ! En cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’acquéreur (commerçant, artisan ou professionnel libéral), la procédure collective bloque la clause résolutoire du contrat, et les recours du vendeur ne peuvent s’exercer. Dans cette hypothèse, le crédirentier ne peut faire résoudre la vente. Et comme le transfert de propriété a déjà été opéré, il ne s’agit pas d’un contrat “en cours” (au sens des dispositions régissant les procédures collectives), de sorte que les rentes viagères ne doivent plus être payées ! La situation est alors particulièrement préoccupante pour le crédirentier.

pour l’acheteur

L’acheteur (le débirentier) trouve dans le viager les raisons économiques d’un « placement épargne » et la possibilité d’une « bonne affaire ». S’il rencontre des difficultés,   et ne peut plus assumer le paiement de la rente, il a la possibilité de revendre le bien, et le viager est repris par le nouvel acquéreur. Il n’est pas “prisonnier” du viager, même si le marché de “revente” est étroit.

Les inconvénients

Cependant, si le vendeur est à l’image de Jeanne Calment (morte à 122 ans), il existe  pour l’acheteur un risque de payer, au final, bien plus que la valeur du bien !

Il peut aussi exister un facteur d’incertitude supplémentaire en cas de viager réversible (sur 2 têtes), notamment si la différence d’âge entre les époux est importante.

Le viager avec usufruit du bien au vendeur (cas rare) est aussi potentiellement désavantageux (voir plus haut), lorsque le bien est encore occupé par un locataire.

Enfin, quand l’acheteur décède avant le vendeur, la charge de la rente est transmise à ses héritiers.

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