« Mieux vaut prévenir que guérir » rappelle un célèbre adage.
C’est pourquoi, au moment de la création de votre société, ou lors de l’arrivée d’un nouvel associé, il est important de s’interroger sur l’opportunité de rédiger un contrat appelé pacte d’associés dans les SARL ou pacte d’actionnaires dans les SA ou les SAS.
Pourtant, trop souvent, cette question est insuffisamment posée, laissant alors les statuts (plus ou moins « standards ») trancher d’éventuels désaccords.
Un parallèle peut être ici fait avec le mariage, union pour laquelle vous choisissez (généralement) avec soin votre conjoint mais qui, pourtant, se terminera une fois sur trois en moyenne par un divorce plus ou moins amiable. Il en va tout de même avec les associés et les actionnaires au sein des sociétés.
Là aussi, l’absence d’un pacte d’associés pour prévoir clairement les droits et obligations des associés entre eux, rend les « divorces » douloureux pour tous et peut même mettre en péril l’existence même d’une société par ailleurs prospère !
Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts de France, revient dans cet article sur le principe et les conditions d’un pacte d’associés réussi.
Qu’est-ce qu’un pacte d’associés ?
Le pacte d’associés, ou d’actionnaires, est un acte juridique venant en complément des statuts de la société. C’est donc un acte extra-statutaire qui fixe les relations que devront entretenir les associés entre eux lors de la survenance d’événements clairement définis (entrée ou sortie d’un associé, succession, prises de décisions importantes ou stratégiques,…).
Son premier intérêt est déjà d’ouvrir une réflexion et une discussion entre les associés sur leur vision commune du groupe qu’ils vont former dans le cadre de la société.
Cela peut paraître basique. Pourtant, cette étape primordiale de la création d’une société (contrat basé sur l’intuitu personae) est souvent omise, car jugée implicite. Or, cet oubli pourra se révéler la cause de conflits ultérieurs ou de divergences graves et inextricables au cours de la vie sociale.
Avant de rédiger un pacte d’associés, chacun va donc devoir se positionner sur les événements pouvant éventuellement avoir une influence sur la société, partager ses réflexions et, finalement, vérifier sa compatibilité avec les autres.
Le second intérêt est de fixer « noir sur blanc » les « règles du jeu » régissant la communauté des associés.
Dans ce cadre, quelques questions en particulier doivent y être clairement tranchées :
- Je veux vendre l’entreprise, tu ne le veux pas, que se passe-t-il ?
- J’apporte 80% du « business » mais reçois la même rémunération que toi, que se passe-t-il ?
- Tu ne fais plus rien, voire tu pars chez un concurrent, que puis-je faire ?
- Puis-je avoir une autre activité ?
- Je souhaite céder mes parts ou actions à l’un des membres de ma famille, que se passe-t-il ?
Cette discussion préalable à la rédaction d’un pacte d’associés sur des questions aussi fondamentales est donc essentielle. Pourtant, encore une fois, dans l’euphorie entourant souvent la création d’une entreprise, elle est mise de côté.
Bon à savoir :
Dans le cadre d’une SAS, la grande liberté laissée aux associés dans la rédaction des statuts permet facilement d’intégrer le pacte d’actionnaires à ces derniers, lui conférant une force juridique supplémentaire. Attention toutefois, car les statuts sont publics (déposés et consultables auprès du Greffe) alors que toutes les clauses n’ont pas vocation à être connues de l’ensemble des tiers… Il est donc souvent plus intéressant de maintenir un pacte plus confidentiel, distinct des statuts.
Un pacte d’associés doit-il concerner tous les associés ?
Non, un pacte d’associés peut ne concerner qu’une partie seulement des associés. Dans ce cas, seuls les signataires seront engagés.
Quelle est la durée de validité d’un pacte d’associés ?
La durée d’un pacte est libre. Elle peut même être à durée indéterminée.
Cette dernière option est cependant à déconseiller parce qu’alors tout associé signataire aurait le pouvoir de dénoncer le pacte unilatéralement, et à tout moment. De plus, la réflexion à laquelle nous incitons les associés lors de la création de l’entreprise est que le pacte soit régulièrement actualisé au cours de la vie sociale.
La durée habituelle d’un pacte est de 7 ans. Il peut être renouvelable par reconduction tacite.
Comment modifier un pacte d’associés ?
Le pacte d’associés peut être modifié à tout moment par rédaction d’un avenant. Cependant, l’accord de tous les signataires originels est exigé pour la validité de ce dernier.
Comment rompre un pacte d’associés à durée déterminée?
La rupture d’un pacte d’associés à durée déterminée n’est possible que dans trois cas :
- lors du terme fixé,
- lors de la survenance d’événements particuliers définis dans le pacte lui-même (par exemple, le non-respect du pacte par l’un de ses signataires),
- en cas d’accord unanime des signataires.
Quelles sont les clauses importantes d’un pacte d’associés ?
Il existe trois grandes catégories de clauses dans un pacte d’associés :
- Les clauses relatives à la gestion et à l’organisation de la société : quel mode de gouvernance, quelles décisions, par qui, quel droit à l’information,…
- Les clauses relatives à la gestion du capital : qui peut vendre, comment, sous quel délai, à qui, pour quelle valeur,…
- Et les clauses relatives aux droits de vote : quelles majorités pour quelles décisions,…
D’autres clauses annexes peuvent également être prévues : sanctions en cas de violation du pacte d’associés, clause résolutoire, clause de compétence exclusive,…
Attention toutefois à ce que le pacte d’associés n’aille pas à l’encontre des statuts et des règles du droit des sociétés qui prévaudront toujours dans ce cas.
Les principales clauses d’un pacte d’associés relatives à l’organisation de la société
- Mise en place d’un comité de direction (ou comité de pilotage) :
- droits de ce comité,
- fréquence des réunions,
- modalités de gouvernance.
- Droit à l’information des associés :
- Type d’informations remises aux associés (tableaux de bord, situations comptables, rapports,…)
- Fréquence de mise à disposition de ces informations.
- Limitation des droits des dirigeants en matière :
- d’investissement,
- de recours à l’emprunt,
- d’acquisition ou de cession de titres de participation,
- d’embauche de cadres.
- Niveau de rémunération des dirigeants et modalités de leur intéressement et de leurs avantages.
- Renouvellement de la direction.
- Répartition des résultats (politique de distribution).
- Engagement de non concurrence envers la société
Les principales clauses d’un pacte d’associés concernant le capital
Les clauses figurant dans les statuts peuvent être complétées ou précisées dans le cadre d’un pacte d’associés :
- Droit de préemption : c’est le droit d’un associé de bénéficier d’une priorité vis-à-vis des tiers, pour le rachat à un prix identique des titres détenus par les autres associés et qu’ils souhaiteraient céder.
- Clause d’agrément : obligation d’obtenir l’accord des autres associés en cas de cession de titres à un tiers.
Mais d’autres clauses sont également possibles :
- Droit de sortie conjointe : si un ou plusieurs associés détenant un certain pourcentage du capital (80% par exemple) décident de vendre leur parts, les associés minoritaires sont obligés de suivre leur décision et de vendre leurs titres dans les mêmes conditions.
- Clause d’inaliénabilité : cette clause interdit aux signataires de vendre leurs parts pendant une durée déterminée. Elle permet, par exemple le temps de la création et du développement de la société, de sécuriser le capital de cette dernière face aux intérêts financiers particuliers des associés. Cette clause ne peut avoir une durée supérieure à 10 ans.
- Mode de valorisation des parts en cas de séparation. Attention toutefois à la rédaction de cette clause qui se trouve souvent remise en cause devant les tribunaux.
- Clause de « mésentente », appelée également clause « shotgun » ou « buy or sell » : elle est utile dans le cas d’une association paritaire (50/50) pour, dans l’éventualité où une mésentente insurmontable interviendrait entre les associés, éviter la paralysie totale du fonctionnement de la société. Dans ce cas, cette clause peut prévoir que si un associé fait une proposition de rachat des titres de l’autre à un prix donné, le second associé ne peut qu’accepter de vendre ou alors racheter les titres du premier au même prix.
Les principales clauses d’un pacte d’associés concernant les droits de vote
- Clause de majorité : cette clause peut préciser, pour certaines décisions bien définies, des règles de majorité plus strictes que celles définies dans les statuts. Elle permet ainsi d’accroître les droits des minoritaires et d’encadrer plus fortement ceux des dirigeants.
- Clause d’affectation des résultats : il est possible de mettre en œuvre une politique de distribution en fonction du niveau de résultat. Par exemple, 1/3 des résultats sous forme de dividendes au-delà d’un certain seuil.
- Clause de présence des salariés : obligation d’une présence minimale lors de la prise de certaines décisions (quorums personnalisés, plus stricts que ceux prévus par les statuts).
Quelles sanctions en cas de non-respect du pacte d’associés ?
Le pacte d’associés, document contractuel, ne lie que les parties signataires, pas les tiers. Par contre, un tiers venant à subir un dommage du fait de la violation d’un pacte d’associés pourra demander dédommagement.
Pour assurer son respect, le pacte d’associés peut prévoir des sanctions pécuniaires à l’encontre des contrevenants.
Une clause résolutoire peut également être insérée, prévoyant la nullité de l’ensemble du pacte d’associés en cas de violation d’une clause par un ou plusieurs signataires.
Il peut enfin prévoir la localisation de la juridiction compétente en cas de litige. (par exemple le Tribunal de commerce du ressort du siège social de la société).
Conclusion sur le pacte d’associés
Le pacte d’associés représente un outil intéressant pour organiser le fonctionnement et la cohésion des associés d’une société.
C’est pourquoi, au minimum, il nous semble indispensable de discuter entre associés des différents sujets pouvant faire l’objet d’un pacte d’associés. Ce dernier pourra ensuite être rédigé, même simplement, et servir en cas de mésentente.
Comme le mariage, la séparation entre associés est fréquente et potentiellement douloureuse. Alors, pensez à prendre vos précautions.
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