La réévaluation libre

La réévaluation libre consiste à modifier la valeur comptable d’un élément d’actif pour le porter à la valeur actuelle. Elle présente de nombreux avantages pour l’entreprise, mais elle entraîne une plus-value, taxable immédiatement.

Or, la loi de finances pour 2021 met en place une dérogation à cette imposition immédiate, et diffère l’imposition des écarts de réévaluation. Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts de France, explique dans cet article la réévaluation libre.

Qu’est-ce qu’une réévaluation libre ?

Il s’agit d’une opération qui consiste à inscrire à l’actif du bilan de l’entreprise la valeur réelle des actifs. En effet, il arrive souvent que la valorisation des immobilisations au bilan ne corresponde pas à la réalité économique. Et cela pour plusieurs raisons :

  • Les amortissements ont été trop rapides (par suite d’amortissements dégressifs),
  • Les immobilisations ont une durée de vie plus longue que prévue initialement (matériels industriels, par exemple),
  • L’appréciation dans le temps de certains biens (cf. les constructions),
  • La valorisation des titres ou du fonds de commerce.

Attention ! La réévaluation libre est une pratique autorisée par larticle L123-18 du code de commerce, mais elle ne porte que sur les éléments corporels et financiers. Les autres actifs, tels que les immobilisations incorporelles (fonds de commerce, brevets et marques), ainsi que les stocks et les valeurs mobilières de placement ne peuvent faire lobjet dune réévaluation. Les logiciels ne peuvent pas non plus bénéficier de la réévaluation libre.

L’objectif est donc d’inscrire les immobilisations à leur valeur réelle, et pour cela il est nécessaire de faire une réévaluation de toutes les immobilisations corporelles et financières (hors éléments incorporels, bien sûr).

Mais il n’est pas possible de choisir quels biens réévaluer et quels biens ne pas réévaluer : il s’agit d’une réévaluation totale.

 

Avant la loi de finances 2021

La réévaluation libre à toujours été possible. Par contre, avant la loi de finances 2021, elle s’assimilait à une plus-value taxable immédiatement. Cette taxation immédiate en limitait fortement le champ d’application.

En réalité, seules les entreprises en forte difficulté, ayant des déficits reportables importants, pouvaient avoir intérêt à cette réévaluation. Et, dans les faits, les réévaluations libres étaient très rares.

 

Depuis la loi de finances 2021 (art 31)

Dans le cadre de la pandémie de la Covid, une dérogation à l’imposition immédiate de la réévaluation a été mise en œuvre pour les exercices comptables compris entre le 31/12/2020 et le 31/12/2022. (Voir notre article La loi de finances pour 2021). Cette disposition est optionnelle, et il est toujours possible d’être fiscalisé immédiatement, comme dans le régime antérieur.

 

Différé d’imposition

L’entreprise peut donc choisir de différer l’imposition des écarts de réévaluation. Ceux-ci pourront être, pour les immobilisations amortissables, étalés sur 15 ans pour les constructions, et 5 ans pour les autres immobilisations.

La base des immobilisations étant réévaluée, la réintégration sur 15 ans ou sur 5 ans (en fonction du type d’immobilisation) sera neutralisée.

Pour l’administration fiscale, les réintégrations compensant les amortissements, il s’agit d’une simple neutralisation dans la durée.

 

En cas de cession

En cas de cession d’une immobilisation amortissable avant la fin de la période de réintégration, il conviendra de récupérer la fraction non encore imposée et de la fiscaliser immédiatement.

Pour les immobilisations non amortissables, comme les titres et les terrains, il existe un sursis d’imposition. L’imposition sera effective lors de la cession des actifs concernés, avec un engagement de l’entreprise à calculer la plus-value ou la moins-value en fonction de la valeur non réévaluée.

Certaines holdings seront donc intéressées d’apprécier leurs titres à leur juste valeur. Le commissaire aux comptes s’assurera, au travers d’un « impairement test » (test de dépréciation) qu’ils ne sont pas survalorisés. Si c’était le cas, il devra en tenir compte au moment de la certification des comptes.

 

Les avantages

Pour l’entreprise, il peut y avoir un réel intérêt de remonter les capitaux propres :

  • Éviter la perte de plus de la moitié du capital, qui est rédhibitoire pour les banquiers,
  • Présenter la valeur réelle de l’entreprise, notamment dans le cadre d’une cession éventuelle,
  • Rassurer les tiers et notamment les organismes d’assurance-crédit en améliorant la notation (Euler Hermes, Atradius.…),
  • Faciliter l’aide au crédit,
  • Bénéficier de certaines subventions, qui peuvent être plafonnées en fonction du niveau des capitaux propres,

Le principal inconvénient est qu’une réévaluation des actifs réduit la participation des salariés. En effet, la formule de la participation, pour les entreprise de plus de 50 salariés, intègre le niveau des capitaux propres :

Réserve Spéciale de Participation = ½ (Bénéfice fiscal net – 5 % des capitaux propres) X (salaires bruts / Valeur ajoutée)

Conditions de mise en œuvre de la réévaluation libre :

  • La réévaluation doit porter sur la totalité des immobilisations ré-évaluables (immobilisations corporelles, immobilisations financières)
  • Obligations déclaratives : un état de suivi est à joindre à la déclaration de résultat de l’exercice de réévaluation et des exercices suivants. Le mieux est de laisser faire son expert-comptable…
  • Possibilité d’intégrer la réévaluation pour les exercices comptables clos à compter du 31 décembre 2020 et cela jusqu’au 31 décembre 2022.
  • Il est important de pouvoir justifier la valeur des actifs. Le commissaire aux comptes s’assurera que la réévaluation réalisée se justifie !
  • La réévaluation s’inscrira dans les capitaux propres (compte 105). Il est toujours possible, dans un deuxième temps, d’incorporer cet écart de réévaluation dans le capital social de la société. Cela peut être intéressant pour bénéficier du PFU dans les SARL, et de la flat tax à 30 % pour les dividendes compris dans la limite de 10 % du capital social…
  • Attention, la réévaluation libre entraînera sur les exercices suivants une augmentation de la dotation aux amortissements sur les actifs amortissables. Cela ne touchera cependant pas la CAF et n’aura pas d’incidence sur la fiscalité (réintégration fiscale par 15èmes ou par 5èmes)
  • L’entreprise ne remet pas en cause les amortissements précédents. À l’issue de la réévaluation, elle établit un nouveau tableau d’amortissement, et la valeur réévaluée se substitue à l’ancienne,
  • L’écart de réévaluation ne devrait pas avoir d’incidence sur la valeur locative des propriétés bâties. Il convient toutefois d’attendre les commentaires de l’administration.

Nous vous invitons à intégrer cette nouvelle disposition et à peser les avantages d’une telle mesure sur les comptes.

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