Les premiers économistes (appelés économistes « classiques ») se sont peu intéressés aux entreprises ; celles-ci étaient alors qualifiées de « boîtes noires » ayant uniquement un rôle de production en vue d’obtenir la maximisation du profit. Ce rôle, quelque peu superficiel, basé sur des hypothèses discutables telles que la rationalité parfaite de l’entreprise, ou l’accès à une information infinie n’a été remis en cause que dans les années 70, avec la redécouverte d’un article de R. Coase paru en 1937 « The Nature of the Firm ». Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts de France, revient dans cet article sur l’évolution de la perception de l’entreprise dans la société.
Coase et les coûts de transaction dans les entreprises
Dans cet article de 1937, R. Coase va définir l’entreprise (« la firme ») comme « un mode de coordination des transactions alternatif au marché ».
Pour R. Coase , il y a donc deux moyens de se procurer un bien : soit le consommateur l’achète (il a recours au marché) soit il le fabrique en créant ainsi une entreprise. Il a donc le choix entre « faire » et « faire faire ».
Ce qui explique l’existence des entreprises, c’est justement que le recours au marché (« faire faire ») génère un coût, que R. Coase appelle coût de transaction. C’est probablement là que se situe l’intérêt majeur de cet article dans la démonstration que le recours au marché n’est pas gratuit.
Ces coûts de transaction correspondent à :
- la recherche d’information (déterminer les partenaires potentiels, entamer la négociation…)
- la négociation des contrats (recours à un avocat, à un notaire…)
- ou la surveillance pour s’assurer de la correcte exécution du contrat.
Cette notion a été développée par la suite par Williamson ; nous allons donc y revenir.
La création d’entreprises génère aussi des coûts que R. Coase appelle coûts de coordination. Il s’agit alors des charges inhérentes à l’entreprise permettant la production.
Pour Coase, la création d’une entreprise dépend d’une comparaison entre
ces deux coûts. Lorsque que le coût de coordination est inférieur au coût de transaction, la création d’une entreprise (« faire ») est rentable, alors que si le coût de transaction est inférieur au coût de coordination, le recours au marché doit être préféré.
Les coûts de transaction : Williamson entre en jeu
Williamson (prix Nobel d’économie en 2009) n’avait que 5 ans lors de la parution de l’article de R. Coase en 1937. C’est cependant lui qui , dans les années 70, va développer une théorie complète des coûts de transaction en reprenant les travaux de Coase.
Tout d’abord , Williamson va poser deux hypothèses sur le comportement des agents économiques (c’est-à-dire vous et moi).
Notre rationalité est limitée, c’est-à-dire que nous ne pouvons avoir conscience de toutes les possibilités et que nous choisissons avec une information limitée.
Nous adoptons un comportement opportuniste, qui va viser à favoriser nos intérêts aux dépens de ceux des autres.
Ces hypothèses ont pour conséquence d’accroître le risque lorsque l’on a recours au marché (notre rationalité ne nous permet pas de choisir systématiquement la meilleure offre, l’opportunisme nous pousse à nous méfier de notre cocontractant auquel nous imposons un contrôle générant un coût).
A partir ces hypothèses, Williamson va proposer une typologie des situations dans lesquelles l’acteur économique doit avoir recours au marché ou à l’entreprise. Il va également lister les différents types de contrats possibles en cas de recours au marché (contrat classique, contrat bilatéral, contrat avec arbitrage). En nuançant l’approche entre marché et l’entreprise, il a pointé du doigt un troisième mode de régulation.
- Peut-on vraiment chiffrer le coût de transaction d’un bien sur un marché ? Au vu du nombre de situations et de critères possibles, ce coût peut au mieux être estimé (et encore vaguement…) et dans ce cas, comment une entreprise peut-elle savoir si elle a intérêt à « faire » ou « faire-faire » ?
- Cette théorie n’est-elle applicable qu’aux grosses entreprises ? En effet, une PME ou même un consommateur ne disposent pas ou rarement de la possibilité de « faire » à moins de disposer d’une compétence technique particulière ou de ressources financières importantes. Le recours au marché (« faire faire ») est donc indispensable, créant ainsi un marché potentiel favorisant la création des entreprises…
Quel avenir pour la théorie de Coase et Williamson ?
La théorie actuelle sur les coûts de transaction a mis en avant un troisième mode de régulation, un hybride entre le marché et l’entreprise, l’activité en réseau. Il s’agit alors de cumuler les mécanismes de coordination du marché (existence d’un contrat, modalités de surveillance de la prestation…) et les mécanismes de l’entreprise (organisation spécifique, recours à du personnel…). Cette théorie a actuellement le vent en poupe puisqu’elle est sensée permettre aux entreprises de gagner en flexibilité.
Le développement d’internet a donné une actualité à cette théorie. En effet, internet, en facilitant la communication et la mise en contact des personnes, aide la recherche d’information et permet une mise en concurrence plus rapide entre différents prestataires, ce qui accroît le contrôle sur son partenaire, limitant ainsi les comportements opportunistes.
L’échange d’information et la communication de plus en rapide ont eu tendance à favoriser le recours au marché. Cela se traduit par exemple par le fait que les entreprises ont de plus en plus tendance à externaliser certaines de leurs activités. Elles y gagnent en flexibilité et améliorent leurs structures de coût.
Les travaux de Coase et Williamson ont donc une résonnance dans un monde où l’économie numérique est amenée à se développer de plus en plus en vite. La compréhension de leurs travaux permet aussi de mieux saisir les changements à venir dans l’organisation des acteurs économiques.
Vraiment très instructif. Les chefs d’entreprise devraient s’en inspirer pour une meilleure organisation.
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