Les territoires zéro chômeur

« Les territoires zéro chômeur” sont un projet expérimental, issu de la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 “d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée”. Des “entreprises à but d’emploi » (EBE) recrutent en CDI des personnes sans emploi depuis longtemps. L’objectif est la lutte contre le chômage de longue durée, en complétant ou corrigeant les dispositifs existants.

Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts-de-France, détaille ici cette expérience, qui vient (Novembre 2020) d’être étendue à de nouveaux “territoires zéro chômeur”.

 

Le constat

Les politiques sociales contre le chômage de longue durée utilisent des sommes importantes. Indemnisations, prises en charge et soutiens divers, structures d’insertion, emplois aidés, allocations de toute nature, coûts induits par la grande pauvreté, etc.

Or, toutes les politiques menées depuis trente ans pour lutter contre le chômage de longue durée ont été des échecs. “Il faut donc essayer autre chose et développer une action quantitative et non plus seulement qualitative”. Pourquoi ne pas canaliser toutes ces ressources d’une façon différente et réorienter les coûts du chômage ? Pourquoi ne pas imaginer un dispositif nouveau qui “inverse les propositions” ?  Patrick Valentin (Entreprendre pour la solidarité) a imaginé de “partir des compétences, des savoir-faire et des envies des personnes sans emploi pour identifier ensuite sur les territoires les travaux utiles (qui ne manquent pas !) à effectuer.”

 

Le projet

Le principe est simple : plutôt que de verser une indemnité aux chômeurs, l’État abonde un fonds qui fait vivre des entreprises à but d’emploi (EBE), et leur transfère l’argent pour chaque personne recrutée. Ces nouveaux salariés décident ce qu’ils peuvent ou veulent faire.

Soutenu par ATD Quart Monde, le projet « les territoires zéro chômeur » associe également le Secours catholique, Emmaüs France, Le Pacte civique, et la Fédération des acteurs de la solidarité. Il consiste à utiliser l’ensemble des sommes mobilisées pour indemniser ou prendre en charge la privation d’emploi de longue durée. Des entreprises à but d’emploi (EBE) recrutent en CDI des personnes sans emploi, en lien avec Pôle emploi et les missions locales. Elles développent alors des activités en fonction des compétences de leurs salariés, sans concurrencer le tissu économique local.

 

Rôle et missions

Une association, « Territoires zéro chômeur de longue durée » (TZCLD), a été créée en 2016 pour prendre la suite de l’action. Ses acteurs veulent démontrer “quil est possible, à l’échelle de petits territoires, et sans surcoût significatif pour la collectivité, de proposer à tout chômeur de longue durée qui le souhaite, un emploi à durée indéterminée à temps choisi, en développant des activités utiles pour répondre aux besoins des divers acteurs du territoire”.

L’association TZCLD a pour objet l’animation et le développement du projet tout au long de ses différentes étapes.

  • Soutenir les territoires habilités, capitaliser et tirer les enseignements de la première expérimentation pour améliorer la méthode,
  • Accompagner les territoires volontaires pour entrer dans la démarche et participer à une deuxième expérimentation,
  • Favoriser la diffusion du projet pour obtenir, à terme, la pérennisation de la dé

 

Les EBE

Les entreprises à but d’emploi (EBE) appartiennent au secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS). Elles ont pour objectif de trouver un emploi à toutes les personnes sans travail, en répondant à des besoins non satisfaits au plan local.

Des comités locaux créent ces EBE. Ils s’instaurent sur chaque territoire expérimental. Ils se composent d’acteurs de terrain. (Élus, habitants, services de l’emploi, associations, entreprises, services sociaux, etc.).

Les EBE mettent en œuvre les activités identifiées, en réponse aux compétences et souhaits exprimés par les chômeurs. Il peut s’agir de services à la personne, de travaux de rénovation, de recycleries, de maraîchage, de transport de personnes, d’épiceries ou de garages solidaires, etc. “Les activités sont choisies en fonction du territoire pour répondre à des besoins non satisfaits, car peu rentables”. Seule exigence : ne pas faire concurrence à l’emploi existant.

Les EBE peuvent revêtir différentes formes juridiques (SA, SAS, SCOP, SCIC, association, etc.), mais elles sont toujours à but non lucratif.

Leur fonctionnement s’apparente à celui des structures d’insertion par l’activité économique (SIAE). Cependant leur finalité diffère, car

  • elles ne cherchent pas à permettre aux personnes de s’insérer sur le marché du travail traditionnel. En effet, dans leur majorité, ces salariés sont très éloignés des critères de l’économie actuelle. Bien peu pourront rejoindre une entreprise classique,
  • les salariés sont recrutés selon leurs souhaits. Seuls critères d’éligibilité : être sans emploi depuis plus d’un an, et domiciliés sur le territoire depuis au moins six mois. Aucun diplôme et aucune expérience particulière ne sont exigés.

Les territoires zéro chômeur

Suite à l’adoption de la loi en 2016, 10 territoires avaient été sélectionnés pour se lancer dans l’expérimentation. Ruraux ou urbains, tous comptent entre 5 000 et 10 000 habitants et ont expérimenté la démarche pendant 5 ans.  Au 31/10/2020, 815 personnes y étaient employées dans 13 EBE.

Dans la Métropole Européenne de Lille (MEL), deux entreprises à but d’emploi (EBE) emploient à ce jour 133 salariés : La Fabrique de l’emploi (à Loos et Tourcoing), et La Pioche (à Haubourdin). Roubaix s’intéresse aussi au dispositif, et pourrait devenir TZCLD en Octobre 2022.

De nombreux autres territoires se mobilisent pour mettre en œuvre la démarche. Le 4 Novembre 2020, la loi a été amendée, et le dispositif a été étendu. (au moins 50 nouvelles zones). Par ailleurs, le gouvernement pourra, à titre dérogatoire, habiliter des territoires supplémentaires, par décret en Conseil d’État.

 

Le financement

Le projet « les territoire zéro chômeur » prévoit, à moyen terme, deux sources principales de financement :

  • La réorientation des coûts de la privation de l’emploi : ensemble des allocations de différentes natures (RSA, ASS, AAH, CMU…) octroyées aux personnes privées de ressources, apport de cotisations nouvelles (impôts, cotisations sociales) et coûts induits par la grande pauvreté dans les domaines du logement, de la santé, de la sécurité, de la protection de l’enfance, etc. Cette « activation des dépenses passives » consiste à transformer des prestations sociales en revenus d’activité.
  • La « contribution au développement de l’emploi» (CDE) versée aux salariés des EBE, au moins équivalente au Smic, est financée par le fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, abondé par l’État et les collectivités volontaires, avec qui les entreprises signent une convention. Par ailleurs, pour aider les EBE à démarrer leurs activités, les comités locaux et leurs directeurs ont sollicité des fonds d’amorçage (publics et privés). Cette contribution passe de 102% à 95% du Smic à compter du 1er Octobre 2023.

 

Bénéfices de l’opération

Les personnes exclues de l’emploi retrouvent grâce à ce projet dignité et utilité. De plus, le projet renforce le lien social, et améliore l’état de santé des personnes concernées. Enfin, l’argent revient dans le circuit, les populations locales reçoivent de nouveaux services, en créant une “dynamique de territoire”. Besoins sociaux non encore assurés transformés en emplois pérennes, utilité sociale et sauvegarde de l’environnement luttent ainsi contre l’insécurité du revenu. Quelle politique publique peut se targuer de mieux faire ?

 

 

 

Cet article vous a intéressé ? Dites-le nous dans les commentaires ci après ! Et retrouvez nos autres articles sur le blog de Valoxy :

Les territoires zéro chômeur

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires